MYTOOK

Mars 1996 à Février 2010

Mytook, le rouquin du cœur

Mytook est le fils de Jessie et Inook.
De cette portée, nous avons gardé trois chiots. Et lui est né le premier
— non sans mal. Jessie, affolée, tournait en rond, s’asseyait malgré elle sur le petit qui peinait à sortir.
Je le voyais devenir tout bleu, et il me fallait agir vite.

Je n’étais pas vétérinaire, juste une musheuse pleine d’amour et d’instinct. Alors j’ai attendu une accalmie entre deux contractions pour l’aider à naître. J’ai tiré doucement, percé la poche sans attendre, et soufflé, massé, supplié.
Il ne respirait pas. Mais au bout de longues secondes, Mytook est revenu à la vie, minuscule et fragile, dans le creux de mes mains.

Un petit rouquin flamboyant, tout comme son père.
Déjà, il avait conquis mon cœur. J’espérais tant retrouver un peu d’Inook à travers lui… alors, au premier regard, nous avons su :
 il resterait avec nous. Pourtant, au fil du temps, il ne lui ressemblait que par la couleur.
Mytook était lui-même, singulier et doux, rêveur au regard flottant.

C’était notre chien « Peace & Love ».
Le dormeur de la meute, souvent dans la lune, souvent dans les nuages… sauf à l’attelage. Là, il se transformait.
Puissant, dynamique, il poussait des hurlements de joie qui faisaient vibrer la ligne entière.
Comme tous les rouquins, il « parlait » beaucoup, pour notre plus grand plaisir.

Mytook courait souvent en « wheel », à l’arrière, là où la force brute est cruciale. Il avait longtemps accompagné son père en tête,
et cette présence avait reboosté Inook. Ensemble, mes deux roux faisaient la paire.
Dès que je le pouvais, je les emmenais tous les deux : en ville, en voiture, en balade, en forêt…
Oui, j’avoue — ils étaient mes « chouchous ».
Mais peut-on vraiment choisir, quand chaque chien est unique ?

Le seul défaut de Mytook ? Sa jalousie. Si je prenais Inook sans lui, il hurlait sa peine, littéralement.
Chez nous, les chiens vivaient par binômes — père et fils, mère et fille… une meute soudée, équilibrée, unie.
D’où cette phrase que je répétais souvent :
« Derrière un rouquin se cache un autre rouquin… ! »


Puis il y eut 2005, l’année du grand basculement.
Mon départ des Vosges, le divorce, la vente du domaine.
J’aurais voulu garder Mytook avec moi, mais les choses ne m’ont pas laissé le choix.
Franck devait garder au moins deux chiens. Moi, je partais avec Kumiak, Jessie et Mytika pour un appartement .
C’est avec une angoisse sourde que je lui ai laissé Mytook. Et je ne le quittais pas des yeux.

Très vite, j’ai appris que Franck ne pourrait pas le garder.
Mon amie Lili a trouvé une famille : un jeune couple, loin, à 600 km de chez moi. Je leur ai annoncé la couleur tout de suite :
« Je resterai derrière, et s’ils ne lui donnent pas le meilleur, je le reprendrai. »

Durant trois longues années, j’ai fait des allers-retours, sans relâche, pour revoir Mytook, pour m’assurer qu’il allait bien.
Mais je sentais… il n’était pas heureux.
Je le voyais par petits bouts. Et pendant trois ans, j’ai pleuré notre séparation.
Trois ans à me battre, jusqu’à envisager la justice.
Et puis, un soir de Noël, le téléphone sonne :
« On n’en veut plus. Viens le chercher. »

Je suis partie sans attendre.
Quand je l’ai retrouvé, il était malade, triste, amaigri. Mais j’étais là. Et je lui ai promis : 
plus jamais nous ne serons séparés.Il a retrouvé sa maman Jessie, retrouvé la joie, retrouvé Lyon,
et vécu encore presque quatre années de bonheur, de câlins, de promenades, de tendresse absolue.

Mytook est mort dans mes bras en février 2010.
Le dernier à vivre encore avec moi, de ma grande meute.

Ce fut un choc. Terrible. Après lui… plus rien. Un silence glacial. Une absence criante.
Six mois sans chien. Une horreur. Moi, qui avais vécu vingt ans entourée de onze Huskies, je me retrouvais seule.
Des torrents de larmes. Une tristesse insondable. Chaque souvenir me ramenait à eux.
À tous ceux qui étaient partis, les uns après les autres.

Et puis… après lui, Baïkal, mon Malamute. Puis Guizmo, mon chat.
Une extension de la meute. Une nouvelle histoire. Jamais ils ne remplaceront mes onze.
Mais Baïkal m’a apaisée, m’a redonné le sourire.
elle a ravivé cette passion que je croyais morte avec le dernier de mes chiens.