

Mâle croisé Husky / Alaskan
janvier 1995 à Aout 2011
Kumiak, compagnon discret
Kumy est arrivé chez nous un peu par surprise.
C’était lors d’un déplacement dans le Nord de la France,
accompagné d’un ami musher venu chercher un chiot d’une portée qui avait attiré notre attention.
Une annonce promettait un croisement Alaskan soi-disant idéal pour « booster » une meute d’attelage.
Ce n’est que plus tard que nous avons compris qu’un simple croisement Husky/Alaskan n’apportait pas grand-chose…
et que pour véritablement améliorer les performances, mieux valait miser sur un pur chien de course.
Mais à l’époque, l’éleveur vendait bien son affaire : il parlait de grands noms du mushing, citait Nicolas Vanier et Otchum, tout y était pour impressionner. Nous voilà donc partis pour un chiot… enfin, pour le chiot de David, pas pour moi.
Nous avons passé des heures là-bas, à parler de courses, d’entraînements, de chiens.
Et pendant ce temps, les petits trottaient autour de nous.
Il y en avait un, noir comme la nuit, qui venait sans cesse dans mes pattes.
Je résistais. Je résistais encore. Et puis David, avec son sourire malicieux, me dit :
— « Allez Nanou, prends-en un ! Regarde-le, il est superbe ! »
— « Non, non, et non. Jinka va avoir des chiots, c’est pas raisonnable… »
Mais voilà que l’éleveur s’en mêle :
— « Je vous fais un prix pour les deux ! »
David insiste. Je résiste encore.
Et puis ce chiot me lèche le visage.
Et là… j’ai craqué.
C’était courant à l’époque, entre mushers, de se faire ce genre de cadeaux.
Nous sommes donc repartis avec deux chiots au lieu d’un, sans prévenir personne.
Tout le monde dormait à notre retour ça nous arrangeait. On a planqué les nouveaux venus en pouffant comme des gamins.
Le lendemain, il a bien fallu officialiser « Kumiak ». Et finalement, tout est passé comme une lettre à la poste.
Ainsi est arrivé, au milieu de notre meute de Huskies, ce petit croisé tout noir.
En grandissant, Kumiak a pris Inook pour modèle. Il le suivait partout. C’était parfait : je redoutais un peu les tensions entre mâles, mais avec Inook, tout allait de soi. Kumy est devenu un bon chien de tête pas plus rapide que mes autres chiens, mais régulier, volontaire.
Son tempérament révélait son côté Alaskan : plus craintif qu’un Nordique, mais aussi bien plus obéissant. Et sacrément rusé.
Quand je hausse le ton, il file se planquer. Si je m’approche pour lui mettre une tape sur les fesses à cause d’une bêtise il hurle… avant même que je l’aie touché. Incroyable ! Dans la meute, Kumiak avait le rôle du tonton râleur :
grognon avec les plus jeunes qui venaient le renifler, sauf avec Inook bien sûr. Il n’était pas très câlin, pas de ceux qui viennent quémander l’affection mais quand il en avait envie, alors là, nos moments étaient précieux.
Je me souviens d’une animation en montagne, entourés d’enfants. D’ordinaire, Kumiak était timide en public. Et ce jour-là, il est resté quatre heures auprès d’un enfant en fauteuil, la jambe dans le plâtre. Le gamin le caressait sans arrêt, et Kumiak ne bougeait pas.
Cette image m’a marquée. Il y avait entre eux quelque chose d’invisible, mais d’immense.
Il faisait équipe avec Loupiotte. Et quand elle a été blessée, j’ai dû lui apprendre à courir seul en tête d’attelage. Il s’est adapté, sans jamais forcer ce n’était pas un sprinteur, mais un bosseur. Il a pris un peu de poids après sa castration, mais restait un bon chien de travail.
En 2005, après mon départ des Vosges, j’ai gardé Kumiak avec moi quelques temps à Lyon. Puis je l’ai confié à Blandine et Cyril, deux amis formidables qui ont aussi adopté Quézac. C’était important pour moi :
ne pas séparer les membres de la meute, et les savoir entre de bonnes mains, entre amies sûr.
Je leur rendais visite régulièrement, dans mes tournées Vosges/Alsace, pour voir mes chiens placés, comme Nanook chez mon amie Lili. C’était ma façon à moi de rester en paix, de les savoir heureux. De garder le fil d’amour.
Kumiak, c’est aussi le nom de mon entreprise de graphisme — kumiak-design.com.
Pourquoi lui ? Je ne sais toujours pas . Aujourd’hui encore, ce nom l’honore.
Kumiak s’est endormi en août 2011. Il est parti dans un sommeil profond, paisible.
Je suis infiniment reconnaissante à Blandine et Cyril, qui lui ont offert une belle fin de vie, pleine de douceur et de respect.
